LE FOU DU ROI
I Le fou du roi, Je suis le fou du roi, Je ris de ses atours Et du nez des Bourbons, Il apprécie l’humour. Le fou du roi, Je suis le fou du roi, Il sourit à mes tours, Il s’amuse de mes bonds, Il m’attache à sa cour. Il touche ma bosse Avant de prendre carrosse, Car les nains, il le pense, A la bosse bien faite, Lui garderont la chance ; Moi, je me gausse Par des bons mots féroces, Des grands seigneurs de France, Qui, la mine défaite, Me trucident en silence
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Les gardes me rendent honneur Quand ils oient mes clochettes, Je suis l’carillonneur Du roi, pendant les fêtes; Jusqu’au grand chambellan Qui fait sa révérence, Quand passent le Ver Galant Et l’grand nabot de France ; Je passe sous les robes Des dames de compagnie Et, souvent, leur dérobe Leurs parfums interdits ; Je tire deux ou rois pièces De l’oreille de Sully, Qui, d’un coup, voit les caisses Du royaume bien remplies….
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II Le fou du Roi, Je suis le fou du Roi, Un amuseur à gages, Vilain petit bossu, Je fais peur aux beaux pages; Le fou du Roi, Je suis le fou du Roi, Et je tutoies sa maj Esté au vu au su De tout l’aréopage; J’ai le culot De feu mon père Chicot Et sa langue insoumise, Fou d’Henri le troisième, Roi de moeurs imprécises, De ses grelots Résonne encore l’écho, Egayant dans l’église La messe de Requiem Du défunt Duc de Guise.
III Le fou du Roi, Je suis le fou du Roi, Je veillais sur Margot, Lui jouais ritournelles Cantates et rondeaux Le fou du Roi, Je suis le fou du Roi, A force de ragots, De langues criminelles, Henri quitta Margot; Ma nouvelle reine, Médicis souveraine, Dit qu’un être aussi laid, En la place de Grève, Devrait être brûlé; Calembredaine, Le Roi perdrait Touraine Pour garder au palais Le disciple, l’élève Du bouffon Triboulet.
Final (lent) Le fou du Roi, Je suis le fou du Roi, Son équipage dis- Paraît derrière la tour, Majesté, quo vadis ? Soudain, j’ai froid, Tu n’as pas mis tes doigts Sur ma bosse à malice, En ce quatorzième jour De Mai Mille Six Cent Dix |
Les gardes me font escorte Vers la chambre royale Je passe par la grand porte Pour le cérémonial, Jusqu’au grand chambellan Qui cache son désarroi, Je vais contre son plan Passer chemise au Roi; J’anime les fins soupers Que donne le souverain, S’il manie bien l’épée, Il excelle du coup de reins, Et je finis les noces Au lit de gentes dames, Qui, caressant ma bosse, Soupirent et puis se pâment.
Les gardes veillent à mon huis Comme pour un prince et je Dévoile au dauphin Louis Les secrets de mes jeux; Jusqu’au grand chambellan Qui défaille prés du trône, Quand il me voit jonglant Avec sceptre et couronne; L’oreille à la cloison, J’entends les forfaitures, Surprends les trahisons De derrière les tentures; J’ai fait emprisonner Et mettre à la question, Sauvant le Béarnais Pour garder ma fonction. |