L’ADOLESCENCE EN QUARANTAINE

  

I

La quarantaine sur moi se penche,

Elle m’a donné le cheveu rare,

La p’tite bouée autour des hanches

Et dix kilos d’trop quelque part.

J’ai rangé mes airs séducteurs,

Depuis qu’le temps, comme Robinson,

Pour compter les années, les heures,

Me fait des entailles au front…

Mais, quand ses yeux de dix huit ans

Ont traqué mon regard usé,

J’ai tout d’abord, cru un instant

Qu’elle était myope, qu’elle s’amusait,

Et, dix secondes et d’mi plus tard,

Mon cœur charriait un sang nouveau,

Au point qu’mes joues piquaient leur fard,

Donnant l’ivresse à mon cerveau…

Refrain

Un arrière goût de délinquance

M’a rendu l’âme un peu coupable,

On n’goûte plus à l’adolescence,

Une fois qu’on a quitté la table.


II 

La quarantaine m’a fait sous-chef

De service dans une société,

Ancien jeune cadre dynamique, bref,

Un homme sur qui on peut compter ;

Dix heures par jour, hiver été,

On tire les ficelles du pantin,

Qui s’imagine en liberté,

Au jogging le dimanche matin ;

Mais quand sa main de dix huit ans

A effleuré mon poing fermé,

Je n’ai pas cru un seul instant

Que c’était un courant d’air, mais

Finie la course contre la montre,

Je m’suis accroché aux secondes

Volées le temps d’une rencontre

Et je suis entré dans sa ronde.

 

III 

La quarantaine a fait de moi

Un père d’ famille institution,

Qui sert à boucler les fins d’mois

L’amour compris dans l’addition ;

Maison plaisir du mariage

Est devenue maison dortoir

D’une femme qui n’veut pas faire son âge,

D’un homme fermé comme un tiroir ;

Mais quand son corps de dix huit ans

A fui sous moi comme une anguille,

J’ai hésité un court instant

Mon dieu, elle a l’âge de ma fille ;

Puis ma folie sur son clavier

A joué plaisir pour quatre mains

Avec soupirs presque oubliés,

Le remord sera pour demain.

 

 

Refrain

Un arrière goût de délinquance

M’a rendu l’âme un peu coupable,

On n’goute plus à l’adolescence

Une fois qu’on a quitté la table.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Refrain

Un arrière goût de délinquance

M’a rendu l’âme bien coupable ;

J’ai goûté à l’adolescence

Et me remettrais bien à table